1 - We Are Young
2 - Strangers
3 - Logical
4 - Fantasy
5 - Summer Night
6 - Washed Away
7 - All I Ever Wanted Is Your Love
8 - Elisa
9 - Through The Night
10 - Adriatique
11 - Void (In And Out Of The
12 - Through The Night (Yuksek remix)
13 - Strangers (Jupiter remix)
Et s'il y avait un
malentendu concernant Juveniles? Il ne fait aucun doute qu'avec un tel nom de
groupe, ses membres ont voulu condenser en un mot ce qu'est, ou voudrait être, leur musique. Certes une tendance forte du moment dans la pop est au «eighties
revival». Bat For Lashes a su retrouver certains des traits les plus séduisants de cette décennie : brillance de la production et mixage spectaculaire.
Kindness, avec «Seod», parvient à créer un patchwork de house old school et de
new wave aux textures sonores fascinantes. Et si Kavinsky, dans son premier
album Outrun, n'a retenu des années 80
que ses aspects les plus datés, au moins la formule du Français, maquillant ces
références datées par une production too much a le mérite d'être personnelle. Les Rennais
de Juveniles, livrant une reconstitution historique parfois criante du vérité du son new wave, travaillent quant à eux «d'après modèle»…
Le premier titre de l'album, «We Are
Young», étant signé d'un groupe nommé Juveniles, aurait pu être un manifeste esthétique: il n'en est rien avec cette
chanson alanguie. Sa ligne de basse enrobée, ces chimes fatiguants plombent le titre. Quant à la voix maniérée de son chanteur, semblant vouloir sonner eighties à tout prix, elle est assez peu phonogénique. Ce single de Juveniles, qui figura un soir en coming next du Grand Journal de Canal + était supposé être
"calibré" et plutôt télégénique: un début d'album décevant. La
respiration se fait heureusement plus large dès «Stranger», regardant du côté
de la pop vitaminée - et pour le coup on ne peut plus juvénile! - de Phoenix. Là,
oui ça fonctionne! Sur ce shuffle up-tempo, les kilos en trop de «We are Young»
ont fondu: la ligne de basse a gagné en muscle, le chant, toujours problématique, se fait déjà plus articulé,
et le solo de guitare électrique à la New Order - sans doute la meilleure idée du titre - font
de «Stranger» un titre racé et un des temps forts de l'album. Car de temps
forts il y en a malgré tout plus d'un sur cet album. Ainsi «Washed Away», presque un «We Are
Young» en bis, mais avec cette
fois un «climat». Le motif en accords du début, glacial comme du Depeche Mode, la ligne de chant à peine esquissée,
lasse et presque cold wave ont beaucoup de classe… Mais cette voix! Jean-Sylvain Le Gouic semble singer le style pourtant inimitable de
Dave Gahan et Jim Kerr. Ces aînés avaient inventé un type de contraste
chaud-froid, opposant sensualité du timbre et froideur numérique des
instruments. Le Gouic ne nous livre dans le meilleur des cas qu'une trop approximative copie carbone, et souvent agace, la faute d'une voix aux colorations plus ou moins nasales et naturelles
selon les titres! Ceci étant dit, les instrumentaux de Juveniles sont souvent très bons, en témoigne «Through The Night». son beat hyper appuyé, le jeu sur les filtres, ces contrastes marqués entre des
couplets minimalistes et des refrains aux nappes de synth brass opulentes grisent… Comme on parle en parfumerie de
notes gourmandes, peut-être qu'il existe aussi en musique des sonorités
gourmandes. De la même façon, à la fin de «Void (In And Out Of Me)» et après un passage très ambiant, la longue coda, assurée par un Juno 106 pour la basse, et que n'aurait pas renié
Kavinsy, plaira aux amateurs de synthés vintages et de sons fat. Mais alors que «Stranger» et «Washed Away» étaient stylés, évoquant ici Depeche
Mode ou Simple Minds, là New Order, derrière le trop peu mordant «Void» se cache une influence bien moins avantageuse: Kajagoogoo. «Logical» s'en sort mieux: si ses couplets, la faute à une
grille d'accords trop "gentille" sont au niveau du tout venant pop
des eighties, les refrains - merci à la guitare électrique là encore - se font
plus affutés. À signaler, deux remix en fin d'album, qui, comme tout remix sont bavards et inutilement étirés en
longueur.
Est-il possible d'être juvénile quand on se réfugie à ce point et sans distanciation créative, dans le passé?
Peut-importe à vrai dire, ce n'est là qu'un problème de vocabulaire, car cet album est parfois excellent. Un chanteur au style qu'on aimerait plus personnel et quelques titres dispensables sont sans doute la cause de cette impression en demi-teinte.
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