16 septembre 2013

Kurtis Blow - Kurtis Blow (album) (chronique rap oldschool)

Kurtis Blow - Kurtis Blow (1980)



1 - Rappin' blow
2 - The Breaks
3 - Way Out West
4 - Throughout Your Years
5 - Hard Times
6 - All I Want In This Word (Is To Find That Girl)
7 - Takin' Care Of Business
8 - Christmas Rappin'




     Pour l'année 1980, la chronologie du rap a surtout retenu le nom du Sugarhill Gang, avec la sortie d'un LP homonyme, et un tube à la clé: «Rapper's delight»; ce sera le tout premier du rap. Kurtis Blow, un autre pionnier du genre et sans doute d'une envergure supérieure, faisait la même année ses débuts au disque avec Kurtis Blow, premier LP de rap à avoir été enregistré sur une major. Huit titres, dont le classique «The Breaks», du funk toujours, parfois même de la soul. Kurtis Blow, c'est l'archétype du rap oldschool de la fin 70'/début 80', musique de danse essentiellement, qui ne pensait encore qu'à l’entertainment, alors que la breakdance était la hype du moment. Le premier rap est en réalité du funk "amélioré", et souvent du très bon funk : Spoonie Gee, Funky four plus one… Instrumental funk + paroles parlé/chanté = rap. C'est la formule qui s'appliquera jusqu'aux expérimentations électro d'Afrika Bambaataa, puis l'alliage rap/métal des Beastie Boys. En neuf années de carrière, de 1980 à 1988, Kurtis Blow sortira huit albums, et suivra avec plus ou moins de bonheur les évolutions de style du rap. Si les trois premiers LP sont funky et festifs, les cinq suivants, à partir d'Ego Trip ont plus difficilement résisté à l'épreuve du temps: samples, beatbox et bruitages aujourd'hui plus datés que modernes.



     L'influence du groupe Chic est décidément immense. Bien avant Daft Punk, bien avant Random Access Memory, les lignes de basses de Bernard Edwards et les cocottes de guitare de Nile Rodgers faisaient déjà école: Sugarhill gang, Queen, Kurtis Blow… «Rappin Blow» est du rap old school assez typique. Son instrumental à la «Good Times» et au groove imperturbable, est le terrain de jeu idéal pour Blow dont le texte, sur un flow très vieille école, respire un ego trip bon enfant: «So just kick off your shoes, let your fingers pop/Kurtis Blow's just about ready to rock». «Rappin blow» aurait pu être LE single de l'album tant on y retrouve les qualité de tube «The Breaks» qui lui succède dans la tracklist: du funk également, un solo de piano à la «Sex Machine», ici intelligemment coloré par un chorus, des paroles insouciantes. Sur «The Breaks» aussi il ne sera question que de taper dans ses mains et de crier «ho-oo» sur une musique à la Chic… Le gangsta rap n'existait pas encore! À vrai dire, Kurtis Blow ne vaut pas tant pour ses textes que pour sa musique: ce premier album du rappeur new-yorkais est avant tout un album de musicien. Derrière le rappeur, ses instrumentistes sont - c'est audible! - tout à leur plaisir de jouer. John Tropea, en bon guitariste de studio, fait le job, toujours très pro; Jamie Delgado aux percussions sur «The Breaks» donne au titre une touche latino et Craig Short se montre très actif à la basse sur  «Takin Care Of Business». Quant au pianiste, qui prendra quant à lui sur l'album rien moins que trois solos, tous excellents, sa prestation sur «Throughout Your Years» distille un plaisir rare, qu'on n'attend pas forcément sur un album étiqueté «rap». Son instrument, riches en harmoniques est superbement enregistré.

     Certes les paroles se font parfois plus concernées, comme dans «Hard Times», mais ce n'est pas «The Message» non plus, et si «The prices going up, the dollars down» encore nuls «Junkies in the alley with a baseball bat» dans les parages. Quant à la ballade soul «All I Want In This Word (Is To Find That Girl)», après «Here I Am» du Sugarhill Gang, mais avant «You Are» de Grandmaster Flash elle est la preuve que la carte du romantisme était encore jouable en 1980 pour un rappeur. Sur cette chanson en particulier, comme le rap de Grandmaster Flash, hésitant entre disco-funk à la Chic, électro-funk à la Afrika Bambaataa, et même soul des plus glamours, celui de Kurtis Blow, se cherche encore. De ce point de vue, cette ballade très premier degré pourra surprendre de prime d'abord. Mais passées l'étonnement, c'est une superbe parenthèse intimiste qui donne pour la seule fois sur l'album l'occasion de chanter au rappeur: sur le fil, toujours à la limite de la fausseté, et c'est tant mieux.  Idem pour «Throughout Your Years»: pouvait on s'attendre après une telle introduction feutrée au Fender Rhodes à un tel flow bondissant. Difficile ici de ne pas esquisser un sourire amusé. Plus contestable en revanche est l'incursion rock sudiste de «Takin Care Of Business», reprise du groupe Bachman Turner Overdrive.



     Kurtis Blow joue, année de sortie oblige, sur deux tableaux. C'est d'abord un album de funk de haute tenue; et puis surtout un document de première importance pour le rap. 

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